Liens vers les pages web anciennes du KKE
100e anniversaire de l’Internationale communiste
Déclaration du Comité central du KKE
Le CC du KKE célèbre le 100e anniversaire de la création de l'Internationale communiste (IC) (2-6 mars 1919). Il reconnaît sa contribution au mouvement ouvrier et communiste international, tout en soulignant la nécessité de tirer des leçons de l'expérience accumulée de son action.
L’IC, fruit de la victoire de la révolution socialiste d'octobre en Russie (1917), est venu pour répondre au besoin de coordination et d'unité du mouvement ouvrier révolutionnaire international.
La contribution de l’IC au soutien et à la fortification des Partis communistes à l'échelle mondiale, sa solidarité internationaliste désintéressée avec les peuples opprimésen lutte, étaient importantes, la formation des « Brigades internationales »aux côtés de l'Armée démocratique d'Espagne (1936 - 1938) en constituant un exemple.
Son assistance multiforme aux militants persécutés partout dans le monde, son activité éditoriale-éducative, l'organisation d'écoles de formation de cadres avec la théorie révolutionnaire du marxisme-léninisme, le fonctionnement de réseaux d'information politique et d'information journalistique constituent quelques aspects de l'action de l’IC.
Les problèmes et les contradictions de la stratégie de l’IC, qui ont affecté négativement tous les Partis communistes qui étaient ses membres, n’annulent pas sa contribution au Mouvement communiste international.
L'héritage de l’IC, l'étude de son expérience, est aujourd'hui précieux pour la reconstruction du Mouvement communiste international,pour la formation d’une stratégie révolutionnaire unique contre le pouvoir capitaliste.
A. De la 1e Internationale à la 3e Internationale (communiste)
1. Carl Marx et Friedrich Engels, depuis l'époque des révolutions bourgeoises, ont souligné le rôle historique de la classe ouvrière en tant que « fossoyeur du capitalisme » et la nature internationaliste de sa lutte. Ils ont établi scientifiquement la nécessité et la possibilité de la révolution communiste ouvrière et ont posé comme condition préalable à sa victoire l'organisation internationale du mouvement révolutionnaire. Ils ont traité de la question de la corrélation entre la lutte de la classe ouvrière pour la conquête du pouvoir et la guerre entre les États bourgeois pour la distribution des marchés et des sources de matières premières.
Marx et Engels ont joué un rôle de premier plan dans la fondation de l'Union internationale des travailleurs (1e Internationale), créée le 28 septembre 1864 par des syndicats ouvriers, des sociétés d’aide mutuelle, des groupes politiques et culturels, des organisations conspiratrices. La 1e Internationale a été créée en tant qu'organisation internationale avec des sections et des pôles dans les différents pays. Elle a appelé à la solidarité internationale des travailleurs, avertissant la classe ouvrière, en particulier les travailleurs allemands et français, du danger d’une guerre franco-allemande qui pourrait se transformer en guerre d’annexion. La Déclaration de fondation de la 1e Internationale, inspirée du Manifeste communiste, constituait un document important dans les luttes et la vision générale de la classe ouvrière.
Tout au long de la 1e Internationale, Marx et Engels ont joué un rôle de premier plan dans la lutte théorique au sein de celle-ci, contre les perceptions petite-bourgeoises et autres empêchant la classe ouvrière d'exercer son rôle indépendant. Ils ont lutté contre l'opportunisme, lebakuninisme, le lassalisme et le syndicalisme anglais (trade-unionism).
Indépendamment des problèmes d’hétérogénéité idéologique, puisque ses Organisations n’avaient pas adopté le socialisme scientifique, la 1e Internationale a contribué au renforcement de l’action syndicale aux niveaux national et international, au développement de la nature politique de leur activité. Elle a contribué à la prise de conscience de la nécessité de créer des partis politiques ouvriers. Sa dissolution (1876) était le résultat de son incapacité à remplir son rôle dans des conditions de nouvelles demandes, devenue évidente aussi après la défaite de la Commune de Paris (1871), à une époque où le capitalisme entrait dans son dernier stadesuprême, l'impérialiste.
2. La 2e Internationale s'est formée le 14 juillet 1889 à Paris, cent ans après le déclenchement de la Révolution française et la chute de la Bastille, dans une période d'expansion rapide du système capitaliste mondial, avec la formation des monopoles et du capital financier, ainsi quede développement rapide du mouvement ouvrier. Elle reposait principalement sur des partis formés par les fédérations et groupes anciennes de la 1e Internationale sur lesquels les forces réformistes, anarcho-syndicalistes et autres opportunistes exerçaient de l'influence, malgré le fait que le marxisme était devenu un courant dominant dans le mouvement ouvrier. La plupart des partis étaient faibles du point de vue organisationnel et idéologique-politique et étaient sous pression pour limiter la lutte dans le cadre de la légitimité bourgeoise.
En fin de compte, la domination du réformisme dans les partis de la 2e Internationale avait des piliers objectifs matériels dans les sociétés capitalistes développées de l’Ouest, dans la mesure où l’exploitation des colonies leur permettait de faire des concessions à la classe ouvrière et de former une aristocratie ouvrière élargie.
La 2e Internationale ne fonctionnait pas en tant que centre révolutionnaire international, car elle n’avait pas formé un organe directeur unique, elle n’avait pas élaboréduProgramme et duStatut communs, elle n’avait pas publié un organe journalistique,alors que les Décisions de sesCongrèsn'avaient aucun caractère contraignant pour chaque parti national.
La 2e Internationale a été dissoute (1916) à cause de la domination de la déviation opportuniste, ce qui a conduit à la trahison des intérêts de la classe ouvrière en faveur de la bourgeoisie lors de la première Guerre mondiale impérialiste.
La plupart des dirigeants de la 2e Internationale se sont retrouvésdans des camps impérialistes rivaux, certains ont devenu même ministres de la Guerre. Leur trahison n’avait pas tombée du ciel, c’était le résultat de la ligne réformiste et de la coopération avec la bourgeoisie en temps de paix et de « la défense de la patrie bourgeoise » en temps de guerre. Le réformisme a donné naissance au social-chauvinisme. Les bolcheviks de Russie, sous la direction de Vladimir Lénine, les Internationalistes – Spartakistes en Allemagne (Carl Liebknecht, Rosa Luxemburg, Franz Mering, etc.) et certains socialistes des Balkans étaient une exception flagrante.
L’Internationale communiste de sa création jusqu’à son autodissolution
3. La première Guerre mondiale impérialiste a accéléré le processus de transformation des partis sociaux-démocrates en partis bourgeoiscontre-révolutionnaires. La Révolution socialiste victorieuse d'octobre en Russie en 1917 a confirmé la capacité de la classe ouvrière à prendre le pouvoir de manière révolutionnaire. Elle a de nouveau mis à l'ordre du jour la nécessité de créer un centre révolutionnaire mondial unique doté de principes révolutionnaires et d'une structure organisationnelle, fondé sur la théorie de Marx-Engels et l'expérience de la révolution d'octobre. Lénine a joué un rôle de premier plan dans la lutte pour la création de ce centre. Il a soulevé la question du changement des programmes des partis ouvriers, du changement de leur nom en Partis communistes, et de la nécessité de créer une nouvelle Internationale.
L’IC a été créée dans le contexte de la montée du mouvement révolutionnaire en Europe, exprimé surtout par les soulèvements ouvriers en Finlande (1918), en Allemagne (1918-1923) et en Hongrie (1919), ainsi que par l'action des travailleurs pionniers du monde entier, par des grèves, des manifestations et des boycotts du transport de munitions au cours de l'intervention impérialiste de 14 États dans la Russie révolutionnaire. L’IC a donné une impulsion significative à la création de Partis communistes, indépendamment du fait que ceux-ci, tout en adoptant ses proclamations, n’avaient pas encore acquis la maturité idéologique et politique pour formuler un programme scientifiquement élaboré et une stratégie correspondante.
4. Au 1er Congrès fondateur de l’IC ont pris part 52 représentants de 35 Organisations de 31 pays d'Europe, d'Amérique et d'Asie, alors que certains délégués ne sont pas arrivés au Congrès parce qu'ils ont été arrêtés par les gouvernements bourgeois. Avec la création de l’IC, la scission des certains partis sociaux-démocrates, a été officialisée aux niveaux international et national.
La déclaration du Congrès estimait: « Une nouvelle ère a commencé! C'est l'ère de l'effondrement du capitalisme et de sa désintégration interne. L'ère de la révolution communiste prolétarienne ... ». La déclaration de programme de l’IC proclamait la dictature du prolétariat, s’était opposé à la démocratie bourgeoise en tant que forme de la dictature du capital et avaitformuléun Manifeste adressé au prolétariat international.
En novembre 1919, l'Internationale de la jeunesse communiste a été créée en Berlin pour unir les forces révolutionnaires de la jeunesse, sur la base de l’orientation générale de l’IC,mettant en avant des revendications relatives aux conditions de l'éducation, de la vie, du travail de la jeunesse, et la lutte contre le militarisme.
En janvier 1920, la Fédération communiste balkanique (FCB) a été créée en tant que centre unique desPartis communistes des Balkans, dont la première Décision était de rejoindre l’IC.
L'Internationale communiste devait lutter contre l’influence de la social-démocratie sur le mouvement ouvrier. À la fin de la guerre, le personnel bourgeois et les forces opportunistes se sont adaptés, ce qui se traduisait par la dominationdu pacifisme dans leur propagande, contrairement à la nécessité pour la classe ouvrière de lutter pour la conquêtedu pouvoir. Sur cette base, la 2e Internationale a été reconstruite et, après la création de la 3e Internationale, la soi-disant 2e ½ Internationalea fonctionné pendant quelques années, au sein de laquelle la soi-disant social-démocratie « de gauche » se regroupait. Ces deux organisations ont continué d'influencer le mouvement ouvrier, aidées également par les gouvernements bourgeois. Au niveau international, ils ont combattu le pouvoir soviétique. Dans le même temps, la 2e et la2e ½ Internationale se sont regroupéesau sein de l’Internationale syndicale d'Amsterdam, soutenue par le Bureau international du Travail, un organe de la Société des Nations impérialiste, ayant pour but de promouvoir les adaptations bourgeois nécessaires et la collaboration de classe.
5. Le 2e Congrès de l’IC (Petrograd et Moscou, 6-25 juillet 1920) a adopté desPositions et du Statut. Les Positions posaient les questions de la préparation directe à la dictature prolétarienne, la formation dans chaque pays d'un PC unique, le renforcement de l’activité des groupes et des partis qui reconnaissaient la dictature du prolétariat, la combinaison du travail légal et illégal. Dans le même temps, ils ont estimé que l'action des partis et des groupes « est loin d'avoir subi cette modification fondamentale, ce renouvellement radical, qui est nécessaire, pour qu'on en reconnaisse l'action comme étant bien communiste et comme correspondant aux tâches de la veille de la dictature prolétarienne ».
Un document de grande importancedu Congrès était le texte avec les 21 conditions d'admission à l’IC, suggérées par Lénine critiquant les opportunistes et les représentants oscillants du Congrès, qui affirmaient que le bolchevisme était un phénomène exclusivement russe. Il a montré l’universalisation du bolchevisme, qui n’allait pasà l’encontre de spécificités nationales. Desconditions fondamentales étaient l’élimination des éléments sociaux-démocrates et réformistes des partis, l’acceptation du principe de la centralisation démocratique au sein de chaque parti et de l’IC, la suspension de ceux qui étaient en désaccord avec les positions de l’IC, la condamnation du pacifisme et du social-chauvinismeet donc du colonialisme.
Lénine, avec son œuvre important « La maladie infantile du communisme (le gauchisme) », a combattu le sectarisme qui rejetait la nécessité de combiner toutes les formes de lutte, la lutte parlementaire et la lutte de masse extraparlementaire. Cependant, l'opportunisme de droite a exploité la lutte nécessaire contre cette forme de déviation pour se renforcer dans les lignes des partis de l’IC.
Parallèlement aux travaux du 2e (et depuis du3e) Congrèsde l’IC, des Conférences internationales de femmes représentantes ont été convoquées, pour le travail spécial parmi les femmes. Ayant son siège à Moscou, le Secrétariat international desFemmesa été mis en place, dirigé par Clara Ceckin.
6. Le 3e Congrès de l’IC (Moscou, 22 juin - 12 juillet 1921) a tenté d'améliorer l'action des communistes parmi des forces ouvriers politiquement immatures, la majorité des travailleurs syndiqués demeurant piégés dans les partis sociaux-démocrates, tandis qu’au sein de certains le conflit idéologique aigu continuait, comme en Allemagne et en Italie.
Les soulèvements révolutionnaires en Finlande, en Allemagne et en Hongrie étaient des étapes historiques de grande importance. Cependant, le fait qu'ils n’étaient pas victorieux a conduit à un changement défavorable de la corrélation des forces. Dans le même temps, le pouvoir bourgeois s'est stabilisé; comme résultat, la question de « réforme ou révolution »est devenue un élément clé de la lutte idéologique au sein du mouvement ouvrier révolutionnaire. De plus, il faut prendre en compte la pression exercée par la forte influence de la social-démocratie sur les syndicats, où les communistes avaient une faible présence,également à cause des persécutions, de leur exclusion des lieux de travail et d'une propagande réactionnaire généralisée en faveur de l’« élimination du communisme » des syndicats.
Le 3e Congrès a lancé le slogan « Parmi les masses » et la ligne du « Front ouvrier unique » qui aideraient, dans des conditions non révolutionnaires, l'action commune des travailleurs influencés par les différentes organisations politiques et syndicales.
Le problème le plus fondamental était que dans les nouvelles conditions non révolutionnaires les leçons tirées de la ligne de lutte révolutionnaire dans les Soviets, n’étaient pas exploitées, en tant qu’expérience. Alors, de février à octobre 1917, afin d’obtenir la majorité au seindes Soviets, un puissant front idéologique avait été formé contre les mencheviks, des opportunistes qui avaient déjà été mis en minorité dans le Parti ouvrier social-démocrate de Russie (CSSR) avant 1917.
Lors du 3e Congrès de l’IC, l’Internationale syndicale rouge (Profintern) a été fondé (3 juillet 1921), avec la participation de 220 représentants syndicaux du monde entier, dans le but de reconstruire le mouvement syndical ouvrier avec une orientation de lutte révolutionnaire. Les syndicats qui ont adhéré au Profintern (soit directement, soit en tant que syndicats sympathisants, soit en tant que mouvements minoritaires) comptaient environ 17 000 000 membres. Profintern a cessé son action à la fin de l’année 1937, mais pratiquement il a cessé de fonctionner plus tôt, car les Syndicats rouges ont commencé à fusionner avec les réformistes depuis 1934, en vue de former les Fronts populaires.
7. Après le 3e Congrès, la politique du « Front ouvrier unique » et les relations avec la social-démocratie ont fait l’objet d’une lutte idéologique dans les organes de l’IC.
Certains partis communistes ont correctement interprété le « Front ouvrier unique » comme une lutte pour le développement de l'influence communiste dans les masses ouvrières et leur détachement de la social-démocratie. Dans d’autres cas, il était défini comme moyen de pression d’en bas pour changer la ligne de la direction des partis sociaux-démocrates et pour instaurer une coopération politique d’en haut. Cette interprétation n'était pas justifiée.
La lutte a abouti à la prédominance du concept promouvant la coopération avec la social-démocratie et la non-exclusion de la participation ou du soutien des communistes aux gouvernements bourgeois, adopté dans la Décision du 4e Congrès de l’IC (Moscou, 7 novembre - 3 décembre 1922). Le Congrès a accepté la possibilité que les communistes participent soit à un gouvernement ouvrier-paysan, soit à un gouvernement ouvrier, qui ne serait pas encore une dictature du prolétariat, même s’il ne considérait pas ces gouvernements comme un point de départ historique inévitable pour la dictature du prolétariat.
8. Le 5e Congrès de l’IC (Moscou, 17 juin - 8 juillet 1924) a conclu que le slogan « gouvernement ouvrier-paysan» était essentiellement identique à la dictature du prolétariat, en accordant une attention particulière à la bolchévisation des Partis communistes, ce qui signifiait leur développement sur la base des principes léninistes du Parti de nouveau type.
Ensuite, l’IC, après avoir changé plusieurs fois de façon contradictoire son attitude envers la social-démocratie, a progressivement affaibli son front à l’égard de celle-ci, malgré le fait que cette dernière avait été clairement établie en tant qu’une force politique contre-révolutionnaire du pouvoir bourgeois. Ainsi, les positions opportunistes de droite ont été renforcées au sein des Partis de l’IC.
9. La discussion sur le Programme de l’IC, commencée au 3e Congrès (1921) s’est achevée au 6e Congrès (Moscou, 15 juillet - 1er septembre 1928).
Le Programme a justement mis en avant l'analyse léniniste que « l’inégalité du développement économique et politique est une loi absolue du capitalisme » et qu'il « s’ensuit que la victoire du socialisme est possible au début dans un petit nombre de pays capitalistes ou même dans un seul pays capitaliste pris à part ». Cependant, il a défini trois types de révolutions fondamentaux dans la lutte pour la dictature mondiale du prolétariat, ayant comme critère la position de chaque pays capitaliste dans le système impérialiste international: 1. Les pays du capitalisme développé, dans lesquels il était possible de passer directement à la dictature du prolétariat; 2. Les pays avec un niveau moyen de développement capitaliste, dans lesquels la transformation démocratique bourgeoise n'est pas achevée, où un passage plus ou moins rapide de la révolution démocratique bourgeoise à une révolution socialiste était considéré comme possible; 3. Le pays coloniaux ou semi-coloniaux dans lesquels le passage à la dictature du prolétariat nécessitait une période entière pour transformer la révolution démocratique bourgeoise en une révolution socialiste.
Le caractère international de l'ère du capitalisme monopoliste et l’aiguisement de la contradiction fondamentale entre le capital et le travail ont été sous-estimés. En outre, l'analyse de l’IC ne prenait pas en compte le fait objectif que le développement inégal des économies capitalistes et les relations inégales entre les États ne peuvent être abolis dans le cadre du capitalisme. En fin de compte, le caractère de la révolution dans chaque pays capitaliste est déterminé objectivement par la contradiction fondamentale qu’elle doit résoudre, indépendamment du changement relatif de la position de chaque pays dans le système impérialiste international. Le caractère socialiste et les tâches de la révolution résultent de l’aiguisement de la contradiction fondamentale entre le capital et le travail dans chaque pays capitaliste, à l'ère du capitalisme monopoliste.
Le caractère de l’époque en tant qu’époque de transition du capitalisme au socialisme a été sous-estimé, ainsi que la capacité des relations de production socialistes à donner une grande impulsion, à libérer le développement des forces productives, comme cela a été démontré dans l'Union soviétique.
L'impérialisme était erronément interprété comme une forme de politique étrangère violente des plus puissants États, lorsque dans le système impérialiste il y avait des dizaines de pays (le capitalisme monopoliste s'était formé en Chine, ainsi qu’au Brésil). En même temps, leur qualification en tant que pays dépendantes ne tenait pas compte de l'interaction des intérêts entre la bourgeoisie étrangère et la bourgeoisie locale.
Un autre problème fondamental était que de puissantes forces bourgeoises politiques et sociales étaient incluses dans le processus révolutionnaire, des forces qui étaient déjà au pouvoir, comme en Turquie, ainsi que les classes bourgeoises du Maroc, de la Syrie, etc.
Le 6e Congrès programmatique de l’IC a souligné à juste titre que « la guerre et le capitalisme sont inséparables». Il ressort de cette déclaration que « l'abolition de la guerre n'est possible qu'avec l'abolition du capitalisme ». Il a appelé les travailleurs à « transformer la guerre », qui risquait d’éclater parmi les États impérialistes, « dans une guerre civile des prolétaires contre la classe bourgeoise afin d'établir la dictature du prolétariat et le socialisme ».
Quant à la nature du fascisme, il a estimé qu’il s’agissait d’une forme de réaction capitaliste impérialiste dans des circonstances historiques particulières, « pour assurer une plus grande stabilité ... le capitalisme est de plus en plus forcée de passer du système parlementaire à (...) la méthode fasciste ».
Concernant la social-démocratie, il a apprécié: « Au moment le plus crucial pour le capitalisme, elle joue souvent un rôle fasciste. Au cours de son développement, la social-démocratie manifeste des tendances fascistes ». L'évaluation ci-dessus n'était pas correcte. La réalité est qu’à l’égard de la révolution socialiste, la social-démocratie jouait brièvement un rôle de pompier dans la crise des gouvernements bourgeois libéraux et laissait du terrain à des gouvernements fascistes.
10. Avant le 7e Congrès de l’IC (Moscou, 25 juillet - 21 août 1935), les PC français et espagnol, en accord avec le Comité exécutif de l’IC, avaient appelé à une coopération avec les partis sociaux-démocrates. Enfin, les Fronts populaires dans ces pays ont été formés en 1936 en tant que coopération politique entre les partis communistes et les partis sociaux-démocrates et autres partis bourgeois et mouvements opportunistes. Ils ont soutenu ou ont pris part à des gouvernements qui ne contestaient pas le pouvoir capitaliste.
Le 7e Congrès a qualifié la seconde Guerre mondiale qui s’approchait en tant qu’impérialiste, mais il a également donné la priorité à la politique de mise en place d'un front antifasciste. En effet, il a déterminé que l’émergence d’un gouvernement antifasciste était une forme de transition vers le pouvoir ouvrier.
L'évaluation du caractère du fascisme par le 6e Congrès a été remplacée par la position selon laquelle il s'agissait d'une « dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactifs, les plus chauvins et les plus impérialistes du capital financier ». L’évaluation problématique selon laquelle au sein des partis sociaux-démocrates se présentaient une « voie révolutionnaire » était adoptée, qui concluait à la nécessité de « fusionner les partis communistes et socialistes », à condition que ces derniers reconnaissent le renversement révolutionnaire de la souveraineté bourgeoise, l'unité d'action avec les partis communistes, le fonctionnement d'un nouveau parti basé sur la centralisation démocratique. Le fait que le 7e Congrès avait posé les conditions ci-dessus n’annule pas l’essence: qu’ainsi étaient créés des illusions et un esprit de réconciliation, de confusion et d’atténuation du front idéologique-politique contre la social-démocratie et l’opportunisme.
Après l'invasion de l'Allemagne fasciste en URSS, l’IC a changé sa position sur le caractère de la guerre, la définissant comme antifasciste et déclarant que « ... le coup fondamental est désormais dirigé contre le fascisme ... » et qu’ « à ce stade, nous n’appelons pas au renversement du capitalisme dans les différents pays, ni à une révolution mondiale (...), de cette lutte, nous ne devons pas repousser cette partie de la petite bourgeoisie, des intellectuels et de la paysannerie qui est ouvertement favorable au mouvement de libération nationale. Au contraire, nous devons les conquérir en tant qu'alliés et il faut que les communistes adhèrent à ce mouvement comme noyau dirigeant».
Cette position a sous-estimé le fait que le caractère de la guerre est déterminé par la classe qui mène la guerre et ses objets, qu’elle soit initialement et à ce moment particulier sur la défensive ou l’agresseur. La lutte contre le fascisme et la libération de l'occupation étrangère, pour les droits et libertés démocratiques, était déconnectée de la lutte contre le capital.
Les contradictions dans la ligne de l’IC sur le caractère de la seconde Guerre mondiale ont également été influencées par les objectives de la politique étrangère de l'URSS et par sa tentative de se défendre d'une guerre impérialiste. Cependant, dans tous les cas, les besoins de la politique étrangère d'un État socialiste ne peuvent se substituer à la nécessité d'une stratégie révolutionnaire pour chaque pays capitaliste. En fin de compte, la garantie ultime pour un État socialiste est la victoire globale du socialisme ou sa prédominance dans un groupe de pays fort, et donc la lutte pour la révolution dans chaque pays.
11. Le 15 mai 1943, en pleine guerre impérialiste, l'autodissolution de l’IC a été décidée sur proposition de son Bureau, ratifiée par tous les PC. Elle était justifiée en estimant qu'elle avait rempli sa mission historique en tant que forme internationale d'unité du mouvement communiste. La décision sur sa dissolution a noté que, depuis le 7e Congrès, il était nécessaire que le Comité exécutif de l’IC, dans la recherche de solutions à des questions du mouvement ouvrier, « parte des circonstances particulières et des spécificités de chaque pays et évite, comme règle générale, l’implication directe dans les affaires organisationnelles intérieures des partis communistes ». Elle a également noté: « ... compte tenu de la montée et la maturité politique des partis communistes et de leurs dirigeants (...), tout en gardant à l'esprit que pendant la guerre actuelle quelques sections ont soulevé la question de la dissolution de l’IC en tant que centre dirigeant du mouvement syndical international, le Bureau du CE de l'IC, n'ayant pas la possibilité de convoquer une convention dans les conditions d’une guerre mondiale, se permet de soumettre la phrase suivante à la ratification des sections de l’IC: l'Internationale communiste (...) doit être dissoute ».
Staline a justifié l'autodissolution, affirmant, entre autres, qu’ « il révèle les mensonges des hitlériens selon lesquels Moscou a l’intention d’intervenir dans les affaires d'autres États et faire dominer le bolchevisme ».
La décision de l’autodissolution de l’IC était en totale contradiction avec les principes de sa fondation. Elle était en contradiction avec l'esprit et la lettre du Manifeste communiste, avec le principe de l’internationalisme prolétarien, avec la nécessité, en toutes circonstances, d'une stratégie révolutionnaire unique des partis communistes contre l'impérialisme international.
C’est une autre question d’explorer la forme organisationnelle de l’unité du Mouvement communiste international, de son mode de fonctionnement et, bien sûr, toujours ayant pour but la formation d’une stratégie révolutionnaire unique.
12. Après la Seconde Guerre mondiale, la nécessité d'une action unique du Mouvement communiste international à l’égard de la contre-attaque internationale unifiée de l'impérialisme a fait son apparition. Elle a été exprimée par la création du Bureau d'information (Cominform) par des représentants de 9 partis communistes et ouvriers (URSS, Yougoslavie, Roumanie, Bulgarie, Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, France et Italie). La réunion fondatrice s'est fixé pour objectif l'échange d'informations et la coordination des actions. En fait, le Bureau d'information a joué un rôle de premier plan dans le Mouvement communiste international, même s'il ne pouvait en aucun cas couvrir le besoin d'une nouvelle Internationale communiste. Il a été dissout en 1956 en raison du tournant opportuniste de droite (après le 20e Congrès du PCUS) et de la crise du Mouvement communiste international.
Des nouvelles formes de coordination de l'action du Mouvement communiste international, plus détendues, étaient alors les conférences internationales des Partis communistes et ouvriers, qui n’ont pas créé les conditions à une stratégie révolutionnaire unique à l’égard du système impérialiste international.
Le KKE et l'internationale communiste
13. Avant la fondation de l’IC, le Parti socialiste ouvrier de Grèce (SEKE, par la suite KKE) avait proclamé lors de son Congrès de fondation (17-23 novembre 1918) qu'il « se déclare membre de l’Internationale, uni et associé avec les partis de tous les pays, qui luttent pour le renversement du capitalisme international et le triomphe du socialisme international ».
Le Premier Conseil national du SEKE (31 mai - 5 juin 1919) a dénoncé la ligne opportuniste de la 2e Internationale et a chargé le CC de commencer la préparation pour l'adhésion du Parti à l'Internationale communiste.
Le SEKE, ayant pour représentant Dimosthenis Ligdopoulos, a participé en janvier 1920 à la fondation de la Fédération communiste balkanique (FCB).
Le 2e Congrès du SEKE (18-25 avril 1920) a décidé l’adhésion du Parti à l’IC, en acceptant ses principes et résolutions. Il a également décidé d'ajouter le terme « communiste » au nom du Parti, ce qui reflétait les nouveaux élaborations stratégiques et était lié à l'intention de s’associer avec l’IC.
Puis a suivi une période de lutte au sein du Parti avec les pouvoirs exprimant la déviation de droite dans le Parti et contestant la stratégie révolutionnaire de l’IC au nom de « spécificités nationales ».
Finalement, le 3e Congrès extraordinaire du SEKE (26 novembre - 3 décembre 1924) a décidé d’accepter explicitement les Décisions de l’IC et de la FCB et de changer le nom du Parti en Parti communiste de Grèce (KKE) (Section grecque de l'Internationale communiste).
Le KKE a reçu beaucoup d'aide de l’IC. Dans le même temps, sa maturité idéologique-politique était inévitablement liée au cours du Mouvement communiste international, puisque l’IC fonctionnait en tant que parti mondial.
Les changements et les variations continus de la ligne de l’IC (par exemple par rapport au contenu du gouvernement ouvrier-paysan), les problèmes dans quelques de ses positions et élaborations fondamentales (par exemple la stratégie de la « démocratie de gauche» et la classification des pays lors du 6e Congrès), ont eu un impact négatif sur la formulation de sa stratégie.
Toute critique à l’égard de l’IC fait partie de l'autocritique du KKE, ne nie pas son histoire et sa contribution, et dans le même temps ne soustrait pas à la responsabilité de chaque parti-membre envers le mouvement populaire - ouvrier de son pays et au niveau international.
14. Lors de la réunion du CC du KKE (2 juin 1943), la décision du Bureau du CE de l’IC sur sa dissolution a été acceptée. La décision du CC indiquait que « la dissolution (...) est aujourd'hui le seul acte approprié d'une bonne politique marxiste». Aussi, que « la décision de l'Internationale communiste est la conséquence logique et l'évolution de la ligne qu'elle s'est fixée lors de son 7e Congrès » et que « la dissolution supprime tout obstacle à la consolidation de la lutte nationale ». Plus tard, le 7e Congrès du KKE (1-6 octobre 1945) a adopté une résolution sur « l'unité politique internationale de la classe ouvrière ». La résolution exprimait le « souhait d'incorporer, le plus rapidement possible, tous les Partis ouvriers du monde qui croient au socialisme, quelle que soit leur couleur, dans une nouvelle organisation politique internationale unique de la classe ouvrière ». Sur le fond, il abordait la question sur la base de la coopération des PC avec les sociaux-démocrates au niveau international.
15. Pour le KKE, la question de l'évaluation complète de la stratégie, du cours et de l'autodissolution de l’IC reste ouverte à un examen plus approfondi. Un facteur important pour la poursuite de l'étude est la collecte des ressources nécessaires concernant les discussions au sein des organes de l’IC, des organes des PC(b), les discussions bilatérales des partis représentés au CE de l’IC.
La nécessité d'une organisation internationale du mouvement ouvrier révolutionnaire découle du caractère international de la lutte de classe. La question de l'unité idéologique et de la stratégie révolutionnaire est également un devoir de chaque PC, alors que la mesure dans laquelle elle est promue est la grande demande de nos jours aussi.
Le 20e Congrès du KKE (30 mars - 2 avril 2017) a confirmé « le regroupement et le développement du mouvement communiste international constituent une tâche permanente et stable de notre Parti. Elle émerge du caractère international de la lutte de classe »; que « le mouvement communiste est en régression, il trouve difficile de réagir à l’offensive du rival de classe, qui utilise non seulement des moyens de répression mais aussi des moyens idéologiques et politiques, avec l'influence de l'opportunisme ». Le KKE élabore des initiatives visant à former des conditions qui donneront un élan à l’adoption de la stratégie commune des PC, à travers de diverses formes appropriées, comme p.ex. l’Initiative communiste européenne, la « Revue communiste internationale ». Dans le même temps, l'objectif de la formation d’un pôle marxiste-léniniste au sein du Mouvement communiste international existe toujours pour notre Parti. Le KKE est conscient du fait que « la procédure du regroupement révolutionnaire sera lente, tourmenteuse, vulnérable, elle se fondera au conquêt de la capacité des Partis communistes à se renforcer complètement dans leur pays, au niveau idéologique-politique et au niveau organisationnel. En surpassant des positions erronées qui ont dominé dans le Mouvement communiste international pendant les décennies antérieures. En jetant des bases fortes au sein de la classe ouvrière, dans des secteurs d’importance stratégique de l’économie, en renforçant leur intervention au mouvement ouvrier – populaire », chaque PC se renforcera, il associera l’action révolutionnaire à la théorie révolutionnaire.
Le slogan du « Manifeste communiste » est toujours d’actualité :
« Prolétaires de tous les pays, unissez-vous! »
Le CC du KKE
26/02/2019